jeudi, décembre 01, 2005

Une touche


Dans sa noyade Nous cherchons depuis toujours à diversifier ou affiner les plaisirs que nous procurent nos sens. Afin de satisfaire notre Vue, nous avons par convention bâti tout un ensemble de conventions que l’on nomme esthétisme. Pour combler notre sens du Goût, nous inventons de nouvelles cuisines ou cherchons à partager l’exotisme d’autres cultures. La musique, grande ou moderne berce nos journées. Mais, si nos nez cherchent toujours de nouveaux effluves pour nous y baigner, il faut bien l’avouer la cinquième roue de ce carrosse est notre toucher.

Il ne s’agit pourtant pas du moindre et le plaisir que procure la caresse aimante est inappréciable. Mais il semble que par pudeur ou timidité chacun préfère la garder pour son intimité. Ainsi, vous aurez beau chercher, hormis chez quelques marchands de tissus ou de rares graineteries, vous ne trouverez pas de lieu qui lui soit consacré. Pourtant, nous sommes tous à la recherche de ses sensations qui firent frémir Arnold à la découverte des statues de Maude, le grain fin d’un bois ou la rugosité d’une pierre. Il est dans nos sociétés jugé malsain d’aimer l’élasticité du latex, la chaleur du cuir ou la douceur du satin. On taxe d’originalité ceux qui aiment à claquer le papier bulle, froisser les feuilles d’automne, mêler les grains de riz.
Ne pas reconnaître à notre toucher l’importance qu’il occupe me semble contre nature. Nous sommes des millions qui sans oser l’avouer, apprécions le crissement du sable sous nos pieds nus, le réconfort d’une vague, la chaleur du soleil, une rafraîchissante brise, la morsure de la glace, la rondeur des galets.
Même si nos mains sont usées, il n’y a pas plus grande joie que le poids d’un autre sur votre épaule, une joue affleurée, se dire : J’ai été touché.


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