Handicapé en recul
La toute première fois que j’ai croisé William, c’était lors de la remise d’une subvention à la Direction Régionale de la Jeunesse et des Sports. De tous les récipiendaires, il semblait le plus à l’aise. Passant d’un petit groupe à l’autre, il fondait sa bonhommie dans les mondanités avec l’aisance d’un grand habitué. Mais c’est lors de la seconde rencontre qu’il m’a le plus bluffé. C’était durant une soirée de remise des trophées des hortillons du conseil général. On nous avait réunis dans la patinoire du colliséum recouverte d’une moquette pour l’occasion et sur laquelle trônait une estrade où les élus distribuaient poignée de main et récompense aux sportifs qui y allaient de leur petit speetch de remerciement. Lorsque vint son tour d’être congratulé par un officiel, il n’eut aucun besoin d’un long discours pour attirer l’attention sur ses problèmes. Il lui suffit de parader à quelques centimètres de l’estrade en feignant d’ignorer les mains qui lui tendaient la récompense depuis celle-ci, pour faire comprendre que sans rampe d’accès, il ne lui était pas possible d’accéder à ces hauteurs où on l’attendait. Son embarrassant manège était plus éloquent que sa récompense et absurde la position de l’élu tentant de minimiser les choses.
Il y a encore beaucoup de progrès à faire dans l’accession des personnes à mobilité réduite. Sa compagne nous relatait hier sa difficulté à accéder dernièrement à la piste de danse d’une boite de nuit et la nécessaire intervention des forces de l’ordre pour lui faire descendre les escaliers. Ors, dans le journal d’hier, les gros titres faisaient état des mêmes difficultés mais visant cette fois des handicapés mentaux. Si les problèmes de Will sont excusables en raison de la vétusté des locaux et de la forme particulière de l’accès à la boite( un simple escalier en colimaçon) par contre l’attitude du videur qui délibérément fait acte d’une forme de ségrégation par son refus est impardonnable.