vendredi, décembre 28, 2007

Natural city


aile2
Originally uploaded by francois et fier de l'Être.

L’autre jour Sambre me disait regretter de ne plus trouver de ces longs posts purement personnels où elle se plaisait à entrapercevoir mon enfance et ma jeunesse. C’est que par moments, j’ai l’impression d’avoir tout dit de moi et que ces deux ans de confidences résument toute ma vie. Bien sûr, c’est faux et cela reste parcellaire. En feuilletant les pages me reviennent comme autant de pièces de puzzle, tout un tas d’anecdotes omises qui faussent l’aperçu global. Ce faisant, je me rends compte qu’il manque à cette image d’Epinal, la description de bon nombre des bêtises et conneries qui assirent ma réputation de cancre et influèrent sur mon devenir.
Comme je cherchais par laquelle commencer et que Claudine me recommandait d’éviter de me faire mousser, je me suis souvenu de celle-là :
C’était lors de l’une de ces colonies de vacances à caractère pédagogique où nos parents envoyaient leurs deux ainés et qui alliait le côté sportif plaisant à mon frère et ma vocation scientifique.
A l’issue d’une chasse aux papillons, on nous avait appris à manipuler les bocaux de granulés de cyanure où expiraient les éphémères et comment leur entrouvrir les ailes après les avoir épinglés sur une feuille de carton bulle. L’étape suivante consistant à les mettre en scène avant de les recouvrir d’une résine pour réaliser une « inclusion » qui constituerai le cadeau ramené par leur chérubin à leur mère.
Mon sens artistique se satisfaisait mal de la pauvre piéride du chou blanche et noir qui constituait écartelée mon maigre tableau de chasse.
Grâce à mon air candide et un sourire ravageur, j’avais obtenu du moniteur la plus grosse des boite pour mettre en scène un péplum composé de feuille de chou, quelques boutons d’or et même un pissenlit. Au moment de quitter le laboratoire pour laisser nos créations sécher tranquillement toute la nuit et immortaliser dans la résine et pour l’éternité nos œuvres, me vint une inspiration subite qui pensais-je rehausserait le réalisme du tableau. Dans la précipitation, j’avais malheureusement omis l’étape du bocal de cyanure et le malheureux cagouille que j’avais choisi pour interpréter le gourmand rogneur de la feuille de chou s’était défendu comme un beau diable pour échapper à l’emprise mortelle de la résine en moussant d’abondance. De bucolique, la scène résultant témoignait de la vaine lutte de la vie contre les éléments, le tout figé dans un chapelet de bulles.
Aujourd’hui encore, je ne peux m’empêcher de penser avec culpabilité à ce geste si simple, innocent et pourtant si plein de la souffrance d’autrui. Mais par dessus tout, c’est l’iniquité que constitua le surnom de « Tueur » dont on m’affubla dès lors qui me révolta. Ceux là même qui regardaient s’asphyxier les lépidoptères avec ravissement en caressant leur bocal, les choquants contre la parois avant de les immoler par l’aiguille pour offrir le cadavre figé à leurs ascendants, se permettaient de préjuger de ma culpabilité ou de mon innocence, sans remettre en cause la violence de leurs propres gestes.


eXTReMe Tracker