Pierrot
En me promenant hier au soir, le nez levé vers la face grêlée de la dame blanche qui s’effeuillait de voiles cotonneux, je réfléchissais à l’un de mes nombreux travers que l’âge à tendance à effacer. J’étais affreusement septique (pas comme la fosse du même nom). Le scepticisme est né peu de temps après moi, de la découverte par l’expérimentation qu’il était impossible à Pierrot de décrocher pour sa belle ce globe blafard. En effet, comment avec une échelle d’une dizaine de barreaux avait il pu réaliser l’exploit ? J’avais bien vu mon père juché debout sur un grand escabeau de sept marches et n’étais pas suffisamment idiot au point de ne pouvoir constater qu’il est nécessaire pour s’élever dans la vie de disposer d’un point d’appui. Ors, si l’échelle reposait sur les flancs rebondis du visage lunaire, comment pouvait-il le décrocher sans se casser la gueule ? Même en admettant qu’entre le premier dessin et la planche suivante, il ait eu le temps de guérir de ses blessures sur quoi prenait il appui pour remonter là haut et raccrocher le lumignon dont sa belle avait croqué un bon morceau, un quartier. C’est à ce moment que je réalisais que non seulement ce qui est écrits dans la littérature enfantine n’est pas toujours vrai mais qu’aussi aimant soit-ils, il y avait toujours quelqu’un pour tenter d’enseigner ou de transmettre ces contre-vérités pour ne pas dire des mensonges.
Quelques années plus tard, mon professeur de philosophie, comme d’ailleurs celui de mathématiques en rajoutait une couche. Selon eux, avec un levier et un bon point d’appui, ils pouvaient soulever le monde. Comme si cela pouvait ce faire ! Ils ne savaient même pas mentir sans se vendre, en effet, des années durant, ils s’étaient efforcer de faire entrer dans mon petit crâne que la terre tournait autour du soleil, qu’elle flottait dans un truc sans haut ni bas, qu’elle n’avait pas de poids à proprement parler, qu’elle était sphérique et non ronde, enfin tout un tas de fariboles dans le même genre. Avez vous déjà tenté de soulever avec un levier quelque chose qui bouge, tourne, mouvant et léger ? Hein ! Pourtant, je pensais ces pédagogues beaucoup plus avertis des choses de la vie que mes propres parents et à même de les expliquer sans mentir ni me servir l’éternel : Tu comprendras lorsque tu seras plus grand.
C’est la raison pour laquelle, j’ai toujours douté de tous faits tenus pour acquits.
A quoi, me direz-vous peut servir un post tel celui-ci. Comme je me doute que vous n’avez pas envie de jouer aux boulles ou au baseball avec nos corps planétaires, ni même goûter à la lune, j’n’ai lâché ce morceau que pour attirer votre attention à ne point parvenir à de hâtives et catégoriques conclusions basées sur des prémices douteuses. Il est parfois nécessaire pour atteindre le but fixé par nos lunatiques rêveries de disposer d’un solide point d’appui, tandis que nos terre à terres aspirations peuvent s’en passer même si cela semble nécessaire.