Le repas depuis 45 ans : moins de produits frais, plus de plats préparés
Cet article est extrait de Insee Première n°1208 et rédigé par Danielle Besson de la division Synthèses des biens et services à l'Insee
Depuis 1960, la part des dépenses consacrée à l’alimentation à domicile dans le budget de consommation des ménages a baissé de moitié, passant de 25 % à 12 % en 2006. La moitié de ces dépenses est constituée d’aliments que l’on peut consommer en dehors d’un repas (fromage, dessert, fruits, pain...). L’autre moitié est constituée d’aliments que l’on ne mange qu’au cours du repas, c’est-à-dire sous forme d’entrée et de plat principal.
Au sein de ce sous-ensemble, la part des produits transformés à base de viande, de poisson et de légumes a plus que doublé pour atteindre 41 % en 2006, au détriment des produits demandant davantage de préparation personnelle. Le poisson, soutenu par ses produits préparés, s’est substitué en partie à la viande et aux œufs. Les légumes frais et les féculents ont été en partie remplacés par les produits préparés à base de légumes et de pommes de terre.
Comparés aux autres ménages européens, les Français se distinguent par une préférence pour la viande. La part du budget alimentaire consacrée aux légumes et aux féculents y est parmi les moins importantes.
Entre 1960 et 2006, les ménages ont diminué de moitié leur part de budget consacrée à l’alimentation.
Elle est passée de 25 % à 12 %. Ce repli traduit d’une part une hausse des prix des produits alimentaires inférieure à l’inflation, du moins jusqu’au milieu des années quatre-vingt-dix. Il résulte d’autre part de l’augmentation du niveau de vie moyen des ménages qui leur permet de consacrer une part moins importante de leurs revenus à ces biens de première nécessité.
En 2006, les ménages ont consacré 63 milliards d’euros aux dépenses en « repas hors dessert » (définitions), constitué de l’entrée et du plat principal, soit 6 % de leur budget total contre 13 % en 1960. La part de ce seul poste, composé de plats d’origine animale ou végétale, a ainsi baissé de façon comparable à celle de l’ensemble des produits alimentaires.
La baisse a été continue et forte jusqu’en 1990 ; elle résultait à la fois d’une diminution relative des prix et des volumes par rapport à l’ensemble de la dépense de consommation. Elle s’est ensuite atténuée, la hausse des prix des produits constituant le repas hors dessert étant devenue légèrement supérieure à l’inflation.
Depuis 1960, la moitié des dépenses alimentaires sont consacrées au repas hors dessert. Dans l’alimentation, la part des produits pouvant relever du dessert, comme les produits sucrés, les fruits ou les yaourts, s’est accrue de 8 points pour atteindre 26 % en 2006. En revanche, sur la même période, la part des autres produits pouvant être consommés en dehors des repas (lait, fromages, pain, céréales, etc.) s’est réduite. Par rapport à la composition moyenne du repas en 1960, les ménages ont modifié la structure de leurs dépenses alimentaires. Ils achètent davantage de produits transformés, au détriment des produits frais et des féculents, qui demandent davantage de travail de préparation personnelle.
Plats d’origine animale : moins de viande mais davantage de poissons et de préparations
En 2006, les achats d’aliments composant les plats d’origine animale ont atteint en moyenne 242 grammes par habitant et par jour (définitions). Les dépenses des ménages se sont élevées à 48 milliards d’euros, soit 2,1 euros par habitant et par jour. Depuis 1960, la part du budget total qui y est consacrée a été divisée par deux et se situe à 4,8 % en 2006. Jusqu’en 1990, elle avait fortement chuté, la hausse des prix de ces aliments étant inférieure à l’inflation. Mais ensuite, la baisse traduit surtout le fait que, avec l’élévation du niveau de vie, les quantités consommées progressent moins vite que la dépense de consommation des ménages en volume. Les dépenses en viande se sont élevées à 36 milliards d’euros en 2006. Elles participent encore majoritairement aux dépenses du repas hors dessert, soit 57% en 2006, contre 59% en 1960.
Les dépenses en œufs y contribuent pour 2 % contre plus du double en 1960. Au contraire, celles en poissons y concourent pour 17 % soit deux fois plus qu’en 1960. Jusqu’en 1990, les dépenses en viande par habitant ont augmenté en volume de + 2,2 % par an en moyenne, soit un rythme proche de celui de la dépense de consommation alimentaire (+ 2,0 %).
Au sein de ce poste, les viandes fraîches ont subi l’essor des produits élaborés à base de viande : la charcuterie et les conserves de viande les ont en partie remplacées. Leur part a doublé depuis 1960 pour atteindre 23 % des dépenses du repas en 2006. Jusqu’en 1990, les dépenses en viandes de boucherie par habitant ont crû moins vite (+ 1,0 % par an) que celles en viandes de volailles (+ 3,6 % par an) et en préparations (+ 3,9 % par an). La part des viandes de boucherie est ainsi passée de 37 % en 1960 à 29 % en 1990. Depuis 1990, la hausse du prix relatif des viandes n’a pas compensé la baisse des dépenses en volume. Les dépenses en viandes de boucherie par habitant ont diminué de 1,6 %par an, celles en viandes de volailles se sont stabilisées et celles en préparations ont crû de 1,5 % par an. Sur cette période, les viandes ont en particulier été l’objet d’inquiétudes sur le risque sanitaire de la filière. Des crises comme l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) en 1996 et 2000, la fièvre aphteuse du mouton en 2001 et la grippe aviaire fin 2005 ont pesé fortement, à court terme, sur la consommation en viandes de boucherie et de volailles et ont pu infléchir leur tendance de plus long terme.
En 2006, les dépenses en poissons se sont élevées à 11 milliards d’euros. En 45 ans, elles ont plus que doublé, à prix constants et par habitant, malgré un prix qui a progressé plus vite que celui des viandes. Elles ont bénéficié d’un désir de diversification des repas, les ménages prenant progressivement conscience des risques liés à une alimentation trop riche en viande.
Depuis 1960, la part des dépenses de repas en conserves et en produits surgelés de poisson a été quasiment multipliée par quatre pour atteindre 11 % en 2006. Ces produits préparés ont pris l’ascendant sur les produits frais de la pêche, dont la part s’est stabilisée autour de 5 %. Avec une évolution des prix moins dynamique que celle des produits de la pêche, les dépenses en produits élaborés ont crû en volume neuf fois plus vite que celles en produits frais.
Moins de légumes frais et de féculents mais plus de préparations
Les ménages ont dépensé 15 milliards d’euros dans les aliments constituant un plat d’origine végétale (définitions) en 2006, soit près du quart des dépenses liées au repas hors dessert. Chaque habitant a dépensé en
moyenne 0,7 euro par jour pour acheter 467 grammes de ces produits. En 45 ans, la part de ces dépenses dans le budget des ménages a diminué de moitié. Elle est désormais de 1,5 % en 2006.
En 2006, les dépenses en légumes frais se sont élevées à 7 milliards d’euros. Leur part dans les dépenses en repas hors dessert (12 %) a baissé depuis 1960, elle était alors de 15 %. Celle en féculents a aussi décru, de 9 % en 1960 à 6 % en 2006. Au contraire, la part des dépenses en préparations de conserves de légumes et de pommes de terre a quasiment doublé pour atteindre 7 % en 2006. Depuis 45 ans, la consommation de ces produits transformés par les industries agricoles et alimentaires s’est donc en partie substituée à celle en légumes frais et en féculents.
Les prix des légumes frais et des féculents sont très volatils. Ils dépendent en partie de l’offre, elle-même affectée par les aléas climatiques. Pluies abondantes, orages de grêle ou sécheresse peuvent réduire la récolte et faire flamber les prix comme en 1962, 1976, 1987 ou 2003. À l’inverse, les contrecoups de ces aléas font chuter les prix, comme en 1963 ou 1978.
Jusqu’en 1990, les dépenses en plats d’origine végétale ont progressé en volume de + 1,3 % par an et par habitant, moins vite que la dépense de consommation alimentaire des ménages (+ 2,0 %). Celles en préparations ont crû de 5,0 % par an. Mais celles en légumes frais (+ 0,5 % par an et par habitant) ont progressé modérément et celles en féculents ont été quasiment stables (– 0,1 %). Pour ces dernières, les hausses des dépenses en riz (+ 3,7 % par an et par habitant) et en pâtes (+ 0,6 %) ont compensé les baisses des dépenses en légumes secs (– 3,7 %) et en pommes de terre (– 1,2 %). Alors que les prix relatifs des plats d’origine végétale avaient baissé jusqu’en 1990, ils se sont quasiment stabilisés depuis (– 0,1 % par an) : la baisse des prix des produits préparés a perduré de façon atténuée mais s’est trouvée en partie compensée par la hausse de ceux des légumes frais et des féculents. Les dépenses en volume des produits d’origine végétale ont augmenté moins vite que les autres postes de consommation. Celles en légumes frais ont progressé moins vite (+ 0,1 % par an et par habitant) qu’avant 1990. Malgré la baisse de leurs prix relatifs, la croissance des dépenses en préparations a été quatre fois moins importante qu’avant 1990. Les dépenses en féculents ont augmenté en volume, quel que soit leur type. En 45 ans, la part de l’ensemble des plats préparés à base de viande, de poisson et de légumes au sein du repas a plus que doublé pour atteindre 41 %en 2006. Jusqu’en 1990, les dépenses de consommation de ces produits transformés ont crû en volume deux fois plus vite (+ 4,4 %par an et par habitant) que la dépense alimentaire.
Elles ont été favorisées par un prix relatif qui diminuait de 1,0 % par an. Depuis 1990, le prix relatif ne baisse plus
et, si la croissance des produits transformés est moindre (+ 1,4 % par an et par habitant), son rythme est resté quatre fois plus rapide que celui de l’ensemble des produits alimentaires.
Les Français se distinguent par une préférence pour la viande
Au sein de l’Union européenne, on peut distinguer deux groupes de pays en matière de dépenses alimentaires. Le premier rassemble des pays dont le PIB par habitant est plus élevé que la moyenne européenne et au sein desquels les ménages consacrent entre 5 % et 14 % de leur budget aux dépenses alimentaires. Dans ces pays, les besoins en nourriture semblent globalement arrivés à saturation. Dans le second groupe, qui comprend en particulier les nouveaux États membres, les pays ont un PIB par habitant inférieur à la moyenne et la part du budget alimentaire se situe entre 14 % et 24 % de la dépense totale. Le lien fort entre niveau de vie et part alimentaire traduit le caractère de première nécessité de la nourriture. Au sein des seules dépenses alimentaires, les deux groupes ne se distinguent en revanche pas quant à la part du repas hors dessert, qui en représente environ la moitié.
En 2006, la part des dépenses alimentaires consacrées aux produits d’origine animale est comprise entre 26 % aux Pays-Bas et 42 % en Espagne. Les Français consacrent la quatrième part la plus importante (38 %) soit cinq points de plus que celle de la moyenne de l’Union européenne à 25. Cette part de budget en viande, poissons, œufs dépend du niveau relatif des prix, du pouvoir d’achat des ménages ainsi que des habitudes de consommation. La part des seules dépenses en viande est comprise entre 21 % en Suède et 35 % en Irlande. En France, elle est plus importante (29 %) qu’en moyenne dans l’Union (25 %). C’est surtout le fait d’un niveau de prix des viandes relativement plus élevé (+ 22 %) que la moyenne européenne, si bien que les volumes d’achat par habitant ne sont que légèrement supérieurs à ceux de la moyenne de l’Union. Il en est de même en Italie et en Belgique. Avec de grandes frontières maritimes, l’Espagne et le Portugal se singularisent par l’importance de la part du budget alimentaire consacrée au poisson : plus de 14 %, contre une part inférieure ou égale à 9 % pour les autres pays de l’Union (9 % en France). En outre, les prix y étant plus faibles que dans les autres pays, les consommations en volume par habitant y sont plus élevées que la moyenne européenne.
Les Français sont peu consommateurs de légumes et de féculents
La part du budget alimentaire consacrée aux produits d’origine végétale par chacun des pays de l’Union est comprise entre 10 %pour le Portugal et 19 %pour Malte. Avec environ 12 %, la France et l’Espagne se situent en dessous de la moyenne de l’Union européenne (14 %), de l’Allemagne et de la Pologne (15 % chacun) et de l’Italie (17 %). Les prix en niveau étant comparables aux principaux partenaires européens de la France, c’est donc le volume de consommation par habitant qui est plus faible en France pour ces produits. Au total, autour d’une répartition assez homogène des dépenses alimentaires, certaines spécificités se dégagent. L’Italie et la Lituanie ont des parts en produits d’origine animale mais aussi végétale des plus importantes, au détriment des autres dépenses alimentaires (desserts, pain...).
À l’inverse, les parts de dépenses des pays nordiques sont inférieures à la moyenne de l’Union, tant pour les produits d’origine animale que végétale. Au sein du repas (hors dessert), l’Italie et la Pologne consacrent des parts de dépenses relativement plus importantes en produits d’origine végétale que la France et l’Espagne. Elles sont parmi les plus fortes de l’Union européenne, de l’ordre d’un tiers de celles réservées au repas. Les Italiens consacrent au riz et aux pâtes une part de dépenses (9 %) plus importante que dans les autres pays (3 % en France). Ils affectent une part de dépenses aux légumes (24 %) un peu plus grande que les Français (21 %). Les Français et les Espagnols réservent une part plutôt faible aux produits d’origine végétale, mais en y privilégiant plus fortement qu’en Italie les légumes au riz et aux pâtes.
Sources
Les données sont issues de la comptabilité nationale et d’Eurostat. Les chiffres concernant la consommation des ménages en
France sont ceux qui ont été publiés le 15 mai 2008.
Définitions
Dans cette étude, la notion subjective du « repas hors dessert » comprend :
– Les plats d’origine animale composés de viandes, de poissons ou d’œufs. Les viandes regroupent les viandes de boucherie et d’abattage, les viandes de volailles et les préparations à base de viande. Les poissons comprennent les produits de la pêche et les préparations de poissons et de produits de la mer.
– Les plats d’origine végétale regroupant les légumes frais, les préparations de conserves de légumes et de pommes de terre et les féculents tels que les pommes de terre, les légumes secs, le riz et les pâtes alimentaires. Il ne comprend pas les boissons, les aliments sucrés ou ceux qui peuvent être associés au dessert (fromage, produits laitiers, fruits, confiseries...) ni les aliments d’accompagnement (pain, condiments...).
Prix
Dans l’ensemble du texte, les agrégats exprimés à prix constants sont calculés aux prix de l’année précédente.
Les données en grammes par habitant correspondant aux achats sont mesurées à partir des ventes, des importations et des exportations. Elles comprennent dans ce cas la consommation dans les cafés et les restaurants, ainsi que les consommations sur le territoire des non-résidents en France, mais ne tiennent pas compte des pertes ni de la consommation hors du territoire des résidents en France. Elles comprennent aussi les produits utilisés en consommation intermédiaire telles que, par exemple, les pommes de terre utilisées pour les purées en flocons ou pour les frites au restaurant.
Achats ou ingestion : Dans cette étude, le terme de consommation renvoie aux achats et non à l’ingestion. Les quantités effectivement mangées, mesurées par des études nutritionnelles, sont différentes de celles faisant l’objet d’achats, qui ne tiennent pas compte des pertes.
Bibliographie
- Rubrique « Comptes nationaux annuels » sur www.insee.fr
- Claire Lesdos-Cauhapé, Danielle Besson, « Les crises sanitaires dans la filière viande. Impact fort à court terme, plus limité à long terme », Insee Première n° 1166, novembre 2007.
- Thibaut de Saint Pol, « La consommation alimentaire des hommes et femmes vivant seuls », Insee Première n° 1194, mai 2008.
Au sein de ce sous-ensemble, la part des produits transformés à base de viande, de poisson et de légumes a plus que doublé pour atteindre 41 % en 2006, au détriment des produits demandant davantage de préparation personnelle. Le poisson, soutenu par ses produits préparés, s’est substitué en partie à la viande et aux œufs. Les légumes frais et les féculents ont été en partie remplacés par les produits préparés à base de légumes et de pommes de terre.
Comparés aux autres ménages européens, les Français se distinguent par une préférence pour la viande. La part du budget alimentaire consacrée aux légumes et aux féculents y est parmi les moins importantes.
Entre 1960 et 2006, les ménages ont diminué de moitié leur part de budget consacrée à l’alimentation.
Elle est passée de 25 % à 12 %. Ce repli traduit d’une part une hausse des prix des produits alimentaires inférieure à l’inflation, du moins jusqu’au milieu des années quatre-vingt-dix. Il résulte d’autre part de l’augmentation du niveau de vie moyen des ménages qui leur permet de consacrer une part moins importante de leurs revenus à ces biens de première nécessité.
En 2006, les ménages ont consacré 63 milliards d’euros aux dépenses en « repas hors dessert » (définitions), constitué de l’entrée et du plat principal, soit 6 % de leur budget total contre 13 % en 1960. La part de ce seul poste, composé de plats d’origine animale ou végétale, a ainsi baissé de façon comparable à celle de l’ensemble des produits alimentaires.
La baisse a été continue et forte jusqu’en 1990 ; elle résultait à la fois d’une diminution relative des prix et des volumes par rapport à l’ensemble de la dépense de consommation. Elle s’est ensuite atténuée, la hausse des prix des produits constituant le repas hors dessert étant devenue légèrement supérieure à l’inflation.
Depuis 1960, la moitié des dépenses alimentaires sont consacrées au repas hors dessert. Dans l’alimentation, la part des produits pouvant relever du dessert, comme les produits sucrés, les fruits ou les yaourts, s’est accrue de 8 points pour atteindre 26 % en 2006. En revanche, sur la même période, la part des autres produits pouvant être consommés en dehors des repas (lait, fromages, pain, céréales, etc.) s’est réduite. Par rapport à la composition moyenne du repas en 1960, les ménages ont modifié la structure de leurs dépenses alimentaires. Ils achètent davantage de produits transformés, au détriment des produits frais et des féculents, qui demandent davantage de travail de préparation personnelle.
Plats d’origine animale : moins de viande mais davantage de poissons et de préparations
En 2006, les achats d’aliments composant les plats d’origine animale ont atteint en moyenne 242 grammes par habitant et par jour (définitions). Les dépenses des ménages se sont élevées à 48 milliards d’euros, soit 2,1 euros par habitant et par jour. Depuis 1960, la part du budget total qui y est consacrée a été divisée par deux et se situe à 4,8 % en 2006. Jusqu’en 1990, elle avait fortement chuté, la hausse des prix de ces aliments étant inférieure à l’inflation. Mais ensuite, la baisse traduit surtout le fait que, avec l’élévation du niveau de vie, les quantités consommées progressent moins vite que la dépense de consommation des ménages en volume. Les dépenses en viande se sont élevées à 36 milliards d’euros en 2006. Elles participent encore majoritairement aux dépenses du repas hors dessert, soit 57% en 2006, contre 59% en 1960.
Les dépenses en œufs y contribuent pour 2 % contre plus du double en 1960. Au contraire, celles en poissons y concourent pour 17 % soit deux fois plus qu’en 1960. Jusqu’en 1990, les dépenses en viande par habitant ont augmenté en volume de + 2,2 % par an en moyenne, soit un rythme proche de celui de la dépense de consommation alimentaire (+ 2,0 %).
Au sein de ce poste, les viandes fraîches ont subi l’essor des produits élaborés à base de viande : la charcuterie et les conserves de viande les ont en partie remplacées. Leur part a doublé depuis 1960 pour atteindre 23 % des dépenses du repas en 2006. Jusqu’en 1990, les dépenses en viandes de boucherie par habitant ont crû moins vite (+ 1,0 % par an) que celles en viandes de volailles (+ 3,6 % par an) et en préparations (+ 3,9 % par an). La part des viandes de boucherie est ainsi passée de 37 % en 1960 à 29 % en 1990. Depuis 1990, la hausse du prix relatif des viandes n’a pas compensé la baisse des dépenses en volume. Les dépenses en viandes de boucherie par habitant ont diminué de 1,6 %par an, celles en viandes de volailles se sont stabilisées et celles en préparations ont crû de 1,5 % par an. Sur cette période, les viandes ont en particulier été l’objet d’inquiétudes sur le risque sanitaire de la filière. Des crises comme l’encéphalopathie spongiforme bovine (ESB) en 1996 et 2000, la fièvre aphteuse du mouton en 2001 et la grippe aviaire fin 2005 ont pesé fortement, à court terme, sur la consommation en viandes de boucherie et de volailles et ont pu infléchir leur tendance de plus long terme.
En 2006, les dépenses en poissons se sont élevées à 11 milliards d’euros. En 45 ans, elles ont plus que doublé, à prix constants et par habitant, malgré un prix qui a progressé plus vite que celui des viandes. Elles ont bénéficié d’un désir de diversification des repas, les ménages prenant progressivement conscience des risques liés à une alimentation trop riche en viande.
Depuis 1960, la part des dépenses de repas en conserves et en produits surgelés de poisson a été quasiment multipliée par quatre pour atteindre 11 % en 2006. Ces produits préparés ont pris l’ascendant sur les produits frais de la pêche, dont la part s’est stabilisée autour de 5 %. Avec une évolution des prix moins dynamique que celle des produits de la pêche, les dépenses en produits élaborés ont crû en volume neuf fois plus vite que celles en produits frais.
Moins de légumes frais et de féculents mais plus de préparations
Les ménages ont dépensé 15 milliards d’euros dans les aliments constituant un plat d’origine végétale (définitions) en 2006, soit près du quart des dépenses liées au repas hors dessert. Chaque habitant a dépensé en
moyenne 0,7 euro par jour pour acheter 467 grammes de ces produits. En 45 ans, la part de ces dépenses dans le budget des ménages a diminué de moitié. Elle est désormais de 1,5 % en 2006.
En 2006, les dépenses en légumes frais se sont élevées à 7 milliards d’euros. Leur part dans les dépenses en repas hors dessert (12 %) a baissé depuis 1960, elle était alors de 15 %. Celle en féculents a aussi décru, de 9 % en 1960 à 6 % en 2006. Au contraire, la part des dépenses en préparations de conserves de légumes et de pommes de terre a quasiment doublé pour atteindre 7 % en 2006. Depuis 45 ans, la consommation de ces produits transformés par les industries agricoles et alimentaires s’est donc en partie substituée à celle en légumes frais et en féculents.
Les prix des légumes frais et des féculents sont très volatils. Ils dépendent en partie de l’offre, elle-même affectée par les aléas climatiques. Pluies abondantes, orages de grêle ou sécheresse peuvent réduire la récolte et faire flamber les prix comme en 1962, 1976, 1987 ou 2003. À l’inverse, les contrecoups de ces aléas font chuter les prix, comme en 1963 ou 1978.
Jusqu’en 1990, les dépenses en plats d’origine végétale ont progressé en volume de + 1,3 % par an et par habitant, moins vite que la dépense de consommation alimentaire des ménages (+ 2,0 %). Celles en préparations ont crû de 5,0 % par an. Mais celles en légumes frais (+ 0,5 % par an et par habitant) ont progressé modérément et celles en féculents ont été quasiment stables (– 0,1 %). Pour ces dernières, les hausses des dépenses en riz (+ 3,7 % par an et par habitant) et en pâtes (+ 0,6 %) ont compensé les baisses des dépenses en légumes secs (– 3,7 %) et en pommes de terre (– 1,2 %). Alors que les prix relatifs des plats d’origine végétale avaient baissé jusqu’en 1990, ils se sont quasiment stabilisés depuis (– 0,1 % par an) : la baisse des prix des produits préparés a perduré de façon atténuée mais s’est trouvée en partie compensée par la hausse de ceux des légumes frais et des féculents. Les dépenses en volume des produits d’origine végétale ont augmenté moins vite que les autres postes de consommation. Celles en légumes frais ont progressé moins vite (+ 0,1 % par an et par habitant) qu’avant 1990. Malgré la baisse de leurs prix relatifs, la croissance des dépenses en préparations a été quatre fois moins importante qu’avant 1990. Les dépenses en féculents ont augmenté en volume, quel que soit leur type. En 45 ans, la part de l’ensemble des plats préparés à base de viande, de poisson et de légumes au sein du repas a plus que doublé pour atteindre 41 %en 2006. Jusqu’en 1990, les dépenses de consommation de ces produits transformés ont crû en volume deux fois plus vite (+ 4,4 %par an et par habitant) que la dépense alimentaire.
Elles ont été favorisées par un prix relatif qui diminuait de 1,0 % par an. Depuis 1990, le prix relatif ne baisse plus
et, si la croissance des produits transformés est moindre (+ 1,4 % par an et par habitant), son rythme est resté quatre fois plus rapide que celui de l’ensemble des produits alimentaires.
Les Français se distinguent par une préférence pour la viande
Au sein de l’Union européenne, on peut distinguer deux groupes de pays en matière de dépenses alimentaires. Le premier rassemble des pays dont le PIB par habitant est plus élevé que la moyenne européenne et au sein desquels les ménages consacrent entre 5 % et 14 % de leur budget aux dépenses alimentaires. Dans ces pays, les besoins en nourriture semblent globalement arrivés à saturation. Dans le second groupe, qui comprend en particulier les nouveaux États membres, les pays ont un PIB par habitant inférieur à la moyenne et la part du budget alimentaire se situe entre 14 % et 24 % de la dépense totale. Le lien fort entre niveau de vie et part alimentaire traduit le caractère de première nécessité de la nourriture. Au sein des seules dépenses alimentaires, les deux groupes ne se distinguent en revanche pas quant à la part du repas hors dessert, qui en représente environ la moitié.
En 2006, la part des dépenses alimentaires consacrées aux produits d’origine animale est comprise entre 26 % aux Pays-Bas et 42 % en Espagne. Les Français consacrent la quatrième part la plus importante (38 %) soit cinq points de plus que celle de la moyenne de l’Union européenne à 25. Cette part de budget en viande, poissons, œufs dépend du niveau relatif des prix, du pouvoir d’achat des ménages ainsi que des habitudes de consommation. La part des seules dépenses en viande est comprise entre 21 % en Suède et 35 % en Irlande. En France, elle est plus importante (29 %) qu’en moyenne dans l’Union (25 %). C’est surtout le fait d’un niveau de prix des viandes relativement plus élevé (+ 22 %) que la moyenne européenne, si bien que les volumes d’achat par habitant ne sont que légèrement supérieurs à ceux de la moyenne de l’Union. Il en est de même en Italie et en Belgique. Avec de grandes frontières maritimes, l’Espagne et le Portugal se singularisent par l’importance de la part du budget alimentaire consacrée au poisson : plus de 14 %, contre une part inférieure ou égale à 9 % pour les autres pays de l’Union (9 % en France). En outre, les prix y étant plus faibles que dans les autres pays, les consommations en volume par habitant y sont plus élevées que la moyenne européenne.
Les Français sont peu consommateurs de légumes et de féculents
La part du budget alimentaire consacrée aux produits d’origine végétale par chacun des pays de l’Union est comprise entre 10 %pour le Portugal et 19 %pour Malte. Avec environ 12 %, la France et l’Espagne se situent en dessous de la moyenne de l’Union européenne (14 %), de l’Allemagne et de la Pologne (15 % chacun) et de l’Italie (17 %). Les prix en niveau étant comparables aux principaux partenaires européens de la France, c’est donc le volume de consommation par habitant qui est plus faible en France pour ces produits. Au total, autour d’une répartition assez homogène des dépenses alimentaires, certaines spécificités se dégagent. L’Italie et la Lituanie ont des parts en produits d’origine animale mais aussi végétale des plus importantes, au détriment des autres dépenses alimentaires (desserts, pain...).
À l’inverse, les parts de dépenses des pays nordiques sont inférieures à la moyenne de l’Union, tant pour les produits d’origine animale que végétale. Au sein du repas (hors dessert), l’Italie et la Pologne consacrent des parts de dépenses relativement plus importantes en produits d’origine végétale que la France et l’Espagne. Elles sont parmi les plus fortes de l’Union européenne, de l’ordre d’un tiers de celles réservées au repas. Les Italiens consacrent au riz et aux pâtes une part de dépenses (9 %) plus importante que dans les autres pays (3 % en France). Ils affectent une part de dépenses aux légumes (24 %) un peu plus grande que les Français (21 %). Les Français et les Espagnols réservent une part plutôt faible aux produits d’origine végétale, mais en y privilégiant plus fortement qu’en Italie les légumes au riz et aux pâtes.
Sources
Les données sont issues de la comptabilité nationale et d’Eurostat. Les chiffres concernant la consommation des ménages en
France sont ceux qui ont été publiés le 15 mai 2008.
Définitions
Dans cette étude, la notion subjective du « repas hors dessert » comprend :
– Les plats d’origine animale composés de viandes, de poissons ou d’œufs. Les viandes regroupent les viandes de boucherie et d’abattage, les viandes de volailles et les préparations à base de viande. Les poissons comprennent les produits de la pêche et les préparations de poissons et de produits de la mer.
– Les plats d’origine végétale regroupant les légumes frais, les préparations de conserves de légumes et de pommes de terre et les féculents tels que les pommes de terre, les légumes secs, le riz et les pâtes alimentaires. Il ne comprend pas les boissons, les aliments sucrés ou ceux qui peuvent être associés au dessert (fromage, produits laitiers, fruits, confiseries...) ni les aliments d’accompagnement (pain, condiments...).
Prix
Dans l’ensemble du texte, les agrégats exprimés à prix constants sont calculés aux prix de l’année précédente.
Les données en grammes par habitant correspondant aux achats sont mesurées à partir des ventes, des importations et des exportations. Elles comprennent dans ce cas la consommation dans les cafés et les restaurants, ainsi que les consommations sur le territoire des non-résidents en France, mais ne tiennent pas compte des pertes ni de la consommation hors du territoire des résidents en France. Elles comprennent aussi les produits utilisés en consommation intermédiaire telles que, par exemple, les pommes de terre utilisées pour les purées en flocons ou pour les frites au restaurant.
Achats ou ingestion : Dans cette étude, le terme de consommation renvoie aux achats et non à l’ingestion. Les quantités effectivement mangées, mesurées par des études nutritionnelles, sont différentes de celles faisant l’objet d’achats, qui ne tiennent pas compte des pertes.
Bibliographie
- Rubrique « Comptes nationaux annuels » sur www.insee.fr
- Claire Lesdos-Cauhapé, Danielle Besson, « Les crises sanitaires dans la filière viande. Impact fort à court terme, plus limité à long terme », Insee Première n° 1166, novembre 2007.
- Thibaut de Saint Pol, « La consommation alimentaire des hommes et femmes vivant seuls », Insee Première n° 1194, mai 2008.